L’étude des invertébrés marins et des écosystèmes benthiques dans les pêcheries australes françaises repose sur l’étude des captures accessoires. Ce travail vise à caractériser les habitats benthiques et à mettre en évidence l’impact des activités de pêche sur ces mêmes habitats. Les résultats de ce travail ont permis de produire une série d’avis scientifiques sur la caractérisation et la hiérarchisation des enjeux de conservation associés. Ces avis ont notamment alimenté les études de préfiguration de l’extension marine de la Réserve Naturelle Nationale des TAAF ainsi que la candidature du territoire à son inscription au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’UNESCO. Il repose sur une double approche, associant la collecte et la mise en collection d’organismes marins capturés par les engins de pêche d’une part, et l’utilisation d’un protocole d’échantillonnage photographique d’autre part.
Dans les Zones Economiques Exclusives françaises et dans les eaux internationales relevant des conventions CCAMLR et APSOI, la collecte opportuniste de spécimens s’inscrit suivant approche qualitative d’inventaire. A bord des navires commerciaux, les spécimens sont collectés par les contrôleurs de pêche sous la supervision du Muséum. A bord des navires scientifiques, lors des campagnes halieutiques d’évaluation des biomasses de poissons, l’échantillonnage des captures accessoires d’invertébrés marins est confié aux agents embarqués du Muséum.
La collecte des spécimens permet d’inventorier les espèces présentes dans les zones de pêche et de décrire de nouvelles espèces découvertes à l’occasion des prospections. Ce travail participe de la construction du socle de connaissances nécessaire à l’évaluation des enjeux écologiques.
Les spécimens sont étudiés au laboratoire grâce à l’analyse des caractères morphologiques et génétiques, en utilisant les approches moléculaires. Après leur étude, les spécimens sont inscrits et conservés au sein des collections patrimoniales nationales de l’établissement. Notre équipe mobilise en outre son réseau d’experts internationaux pour identifier ces invertébrés benthiques, appartenant à de très nombreux groupes faunistiques fortement diversifiés.
Pour suivre l’évolution des besoins en matière d’avis scientifique sur les « Ecosystèmes Marins Vulnérables », l’échantillonnage photographique s’inscrit suivant une logique de suivi pluriannuel. L’enjeu repose prioritairement sur la mise en évidence de tendances statistiques sur l’évolution des peuplements et sur l’étude de l’impact des activités de pêche.
Les spécimens font alors l’objet d’un échantillonnage photographique exhaustif, dans la limite du respect des conditions de sécurité et suivant le temps disponible, ainsi que d’une pesée, en totalité par station ou par grands groupes faunistiques. L’échantillonnage photographique est ensuite traité au laboratoire par du personnel dédié, à l’aide d’une chaîne de traitement bio-informatique développée spécifiquement par notre équipe. Les photographies des organismes sont identifiées et triées. Des mesures de biométrie et des estimations de biomasse permettent d’analyser la composition des peuplements. Les observations d’organismes appartenant à des taxons indicateurs des Ecosystèmes Marins Vulnérables contribuent à l’identification des enjeux de conservation.
Ce protocole d’échantillonnage photographique a permis de mettre en place un flux de données portant le niveau d’observation écosystémique à une échelle inédite pour les invertébrés marins benthiques. Les travaux de recherche en cours, reposant sur ces flux de données et sur l’utilisation de techniques de modélisation, ont permis notamment d’établir les premières cartographies des habitats benthiques de Kerguelen.
Contact : Alexis Martin alexis.martin@mnhn.fr